- GEWANDHAUS DE LEIPZIG (ORCHESTRE DU)
- GEWANDHAUS DE LEIPZIG (ORCHESTRE DU)GEWANDHAUS DE LEIPZIG ORCHESTRE DULes premières bases de ce qui allait devenir l’une des plus importantes institutions musicales allemandes remontent à 1743 lorsque se constitue à Leipzig une petite société de concerts dotée à l’origine de seize musiciens sous la direction de Johann Friedrich Gleditzch. L’arrivée à Leipzig du compositeur Johann Adam Hiller en 1754 donne un essor à cette société, dont l’orchestre atteint trente-trois instrumentistes dans les années 1760. Une telle expansion impose l’adoption d’un lieu de concerts approprié, la salle haute du Gewandhaus, ou halle aux tissus, où l’orchestre se produit pour la première fois le 25 novembre 1781. Il portera désormais le nom d’Orchestre du Gewandhaus de Leipzig. Hiller cède sa place à Johann Gottfried Schicht (1785-1810), auquel succèdent Johann Philipp Schulz (1810-1827) — qui crée le Cinquième Concerto pour piano de Beethoven en 1811 — et Christian August Pohlenz (1827-1835).Felix Mendelssohn (1835-1847) est le premier véritable chef d’orchestre de l’histoire du Gewandhaus: ses prédécesseurs étaient des Konzertmeister qui dirigeaient la plupart du temps de leur place de violon solo. Il révèle la musique de Jean-Sébastien Bach, totalement oublié depuis sa mort en 1750, et crée les grandes partitions romantiques de Schubert (Symphonie no 9 , 1811), Schumann (Symphonie no 1 , 1841; Symphonie no 2 , 1846; Symphonie no 4 , 1841; Concerto pour piano , 1846) ainsi que ses propres œuvres (Symphonie no 3 «Écossaise» , 1842; Concerto pour violon en «mi» mineur ; 1845). À la mort de Mendelssohn, Schumann, qui postulait à ce poste, se voit préférer Julius Rietz (1848-1860), remplacé, entre 1852 et 1854, par deux élèves de Mendelssohn, Niels Gade et Ferdinand David.La deuxième personnalité marquante de l’histoire du Gewandhaus est Carl Reinecke, qui en assure la direction pendant trente-cinq ans (1860-1895). Le répertoire s’ouvre à une nouvelle génération de musiciens, avec néanmoins une certaine prudence, Wagner (dont on crée l’ouverture des Maîtres chanteurs en 1862) se voyant préférer Brahms (Concerto pour violon , 1879) ou Bruckner (Symphonie no 7 , 1884). En 1881, pour le centenaire officiel de l’orchestre, on entreprend la construction de la nouvelle salle du Gewandhaus, inaugurée en 1884, qui permet de porter l’effectif de l’orchestre à soixante-douze musiciens. Arthur Nikisch, chef d’orchestre à l’Opéra de Leipzig entre 1877 et 1889, succède à Reinecke en 1895. Il instaure des méthodes de travail révolutionnaires pour l’époque, avec des répétitions en profondeur pour lutter contre les exécutions approximatives alors si fréquentes. L’effectif passe à quatre-vingt-deux instrumentistes et le répertoire s’ouvre à la musique de Reger, Busoni, Schönberg, Mahler, Richard Strauss... Le Gewandhaus est moins un centre de création qu’un lieu de reprise d’œuvres récentes déjà jouées ailleurs et qui trouvent alors leur consécration. À partir de 1912, Nikisch inaugure une série de grands cycles autour d’un même compositeur: Beethoven, Brahms, Bruckner, Richard Strauss... Il contribue également au rapprochement avec l’autre grande institution musicale de Leipzig, le Thomanerchor (Chœur de l’église Saint-Thomas), qui conduira à l’exécution régulière des passions et cantates de Jean-Sébastien Bach dans l’église dont il avait été le cantor. Nikisch dirige aussi la première tournée de l’Orchestre du Gewandhaus à l’étranger, en Suisse (1916).Le successeur de Nikisch, Wilhelm Furtwängler (1922-1928), assure comme lui simultanément la direction de l’Orchestre philharmonique de Berlin et de celui du Gewandhaus. Mais Furtwängler n’aura pas le temps d’imprimer sa personnalité à Leipzig. Il joue surtout un rôle important dans le domaine de la musique contemporaine, créant les Cinq Pièces pour orchestre op. 16 de Schönberg (seconde version, 1922) et faisant découvrir la musique de Hindemith, Respighi ou Stravinski, dont il dirige Le Sacre du Printemps en 1923. Charles Münch est violon solo de l’orchestre entre 1926 et 1932. Le passage de Bruno Walter à la tête du Gewandhaus est encore plus bref (1929-1933): ses origines juives l’obligent à fuir en Autriche. Hermann Abendroth prend sa succession (1934-1945); il s’agit d’une personnalité fascinante, peu connue hors d’Allemagne, qui révèle les symphonies de Bruckner dans leur version originale et auquel le Gewandhaus doit sa tradition dans ce répertoire.La salle du Gewandhaus tombe sous les bombes le 20 février 1944; l’orchestre s’exile dans la salle des congrès jusqu’à l’inauguration du nouveau bâtiment pour le bicentenaire, en 1981. Herbert Albert assure la direction entre 1946 et 1948, mais c’est Franz Konwitschny qui redonne à l’orchestre son lustre d’antan et ranime la grande tradition allemande. Il procède à un recrutement très sélectif pour accroître l’effectif, qui passe de cent quatre musiciens en 1949 à cent cinquante-six en 1962. L’orchestre peut alors se dédoubler et mener simultanément ses activités de concert (symphoniques ou à Saint-Thomas) et lyriques (où il se produit sous le nom d’Orchestre de l’Opéra de Leipzig). C’est à cette époque que commencent à apparaître les premières sous-formations, comme le Bach Collegium (1963). Václav Neumann (1964-1968) et, surtout, Kurt Masur (directeur musical depuis 1970) tournent une page d’histoire: les activités de l’orchestre se diversifient, les tournées et enregistrements se multiplient, faisant du Gewandhaus la vitrine de la tradition symphonique est-allemande. Lorsque le régime communiste s’effondre, en 1989, Masur joue un rôle modérateur dans les affrontements entre l’opposition et le pouvoir, et ouvre le Gewandhaus aux représentants de toutes les tendances de la musique contemporaine.
Encyclopédie Universelle. 2012.